L’IEIF vient de publier sa 6ᵉ étude annuelle sur le marché français du financement de l’immobilier professionnel, et le moins que l’on puisse dire, c’est que “le secteur traverse une période de turbulences” estime l’investisseur Frédéric Chapuis. Si le marché global pèse quelque 200 milliards d’euros, force est de constater que la production de nouveaux crédits est en recul pour la deuxième année consécutive. Après une baisse de 13% en 2022, elle enregistre une nouvelle diminution de 12% en 2023.
Un contexte marqué par la hausse des taux et le refinancement
Ce ralentissement, selon Chapuis, s’explique en grande partie par la hausse des taux d’intérêt qui a suivi la crise de l’inflation. Les coûts de financement ont explosé, passant de 2-3% à 5-6%, voire plus, impactant lourdement la rentabilité des opérations immobilières.
Dans ce contexte incertain, les prêteurs se recentrent sur le refinancement des crédits existants, qui représente désormais 46% de leur activité contre 26% en 2022. Il s’agit d’accompagner les clients en leur donnant du temps, en attendant une stabilisation du marché.
Des secteurs en souffrance : le bureau et la promotion résidentielle
Certains segments souffrent plus que d’autres de cette situation. Le secteur du bureau est particulièrement touché, notamment les actifs non-prime situés en périphérie des grandes villes. Le télétravail et l’obsolescence de certains immeubles ont accéléré la décote de ces biens, rendant leur financement plus difficile. A l’inverse, les bureaux prime, bien situés et répondant aux nouvelles normes environnementales, conservent une certaine attractivité.
La promotion résidentielle traverse également une crise profonde. La hausse des taux a réduit la solvabilité des acheteurs et la disparition des dispositifs d’incitation fiscale a fait fuir les investisseurs particuliers. Seuls les projets pré-commercialisés auprès de grands acteurs du logement social parviennent à obtenir des financements.
L’ESG, un critère déterminant
Dans ce contexte contraint, les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) jouent un rôle crucial dans l’octroi des financements. Les prêteurs sont attentifs à la performance énergétique des bâtiments, à leur impact sur l’environnement et à la qualité de leur gestion.
Perspectives : prudence et attentisme
L’IEIF anticipe une stabilité des encours à horizon 2-3 ans, mais une nouvelle baisse de la production de crédits en 2024. Le refinancement restera une priorité pour les prêteurs, qui devront gérer les échéances des crédits arrivant à maturité en 2024, 2025 et 2026.
Recommandations aux investisseurs
Dans ce contexte complexe, insiste Chapuis, la prudence est de mise. Avant de se lancer dans un projet immobilier, il est essentiel de bien analyser le marché, de s’assurer de la qualité de l’actif et de sa conformité aux normes ESG. Il est également important de sécuriser un financement auprès d’un prêteur solide et de négocier des conditions favorables.
“Le marché français du financement de l’immobilier professionnel est à la croisée des chemins” conclue Frédéric Chapuis. La reprise dépendra de la capacité des acteurs à s’adapter aux nouvelles réalités du marché et à intégrer les enjeux de la transition écologique.